[Analyse] Crazy Amy ou la monogamie réaliste
Sorti en 2015, Crazy Amy – "Trainwreck : Cas Désespéré" en VO – est une comédie signée Judd Apatow. A priori la bande-annonce nous incite à penser qu’il peut s’agir d’un film cool sur une fille qui assume ses envies, qui fait la fête, et puis elle tombe amoureuse d’un docteur … ouais la fin semble déjà conventionnelle mais pourquoi pas.
Le
film commence avec une scène où le père d’Amy enfant
lui fait répéter ainsi qu’à sa sœur que la « monogamie »
c’est pas réaliste. Ensuite,
on
découvre une
jeune femme qui bosse pour un magazine
à New York – comme
dans beaucoup de comédies américaines -
elle enchaîne les mecs, elle aime boire et les mini jupes. Ça
me semblait cool et ça changeait un peu des héroïnes habituelles.
Sauf que c’est pas vraiment ça. Au fil du film, on veut absolument
que le personnage principale soit une personne « déviante »
dans le sens où si elle n’a pas encore fondé de famille, c’est
à
cause
de blessures affectives qui l’empêchent d’être en couple –
monogame, hétéro, blanc – et
qu’elle ne peut pas avoir choisi consciemment
d’être
une femme qui assume ses envies.
L’alcool,
la drogue, le sexe : c’est caca !
La
consommation de produits modifiant la perception de la réalité n'est pas ici un truc normal, mais une preuve de son immaturité et de sa déviance qu'il faudra abandonner pour s’engager vers la voie de la rationnelle
hétéro-normativité. Oui
la drogue c’est mal et ça fait fuir le Prince Charmant !
Notez
ça dans vos agendas s’il vous plaît, en rouge en dessous de la
date de votre prochain rencard.
Amy
est présentée
comme
une fêtarde mais en plus elle a des relations sexuelles, oui. Enfin
avec des hommes exclusivement et blancs – car elle est raciste –
parce que quand même faudrait pas être troooop inclusif. Outre cet
aspect, Amy est dépeinte
comme une « méchante salope » dans le sens où elle va
coucher avec plusieurs hommes tout en étant en couple avec un mec
qui est une caricature de body builder. Et c’est vraiment
dérangeant car Amy
peut bien faire ce qu’elle
veut, elle n’assume pas réellement son mode de vie et va briser le
cœur
de son copain en lui disant « bah quoi on avait jamais dit qu’on
voyait pas d’autres personnes »…
Si Amy pense réellement que « la monogamie c’est pas réaliste », pourquoi laisser croire à un de ses partenaire qu’elle est monogame aussi longtemps, en oubliant / évitant de parler de sa préférence sexuelle? Pour moi c’est vraiment un aspect problématique car cela véhicule l’image qu’une femme qui aura plusieurs partenaires sera forcément une personne sans réflexion éthique et uniquement animée par une libido intense ! Au final, Amy n’est pas un personnage polyamoureux et non-monosexuel, mais plutôt la caricature d’ « une salope » selon la perspective hétéronormée. C’est d’autant plus dérangeant que le film se termine avec la leçon suivante : la monogamie et la sobriété sont les clés du bonheur…
Si Amy pense réellement que « la monogamie c’est pas réaliste », pourquoi laisser croire à un de ses partenaire qu’elle est monogame aussi longtemps, en oubliant / évitant de parler de sa préférence sexuelle? Pour moi c’est vraiment un aspect problématique car cela véhicule l’image qu’une femme qui aura plusieurs partenaires sera forcément une personne sans réflexion éthique et uniquement animée par une libido intense ! Au final, Amy n’est pas un personnage polyamoureux et non-monosexuel, mais plutôt la caricature d’ « une salope » selon la perspective hétéronormée. C’est d’autant plus dérangeant que le film se termine avec la leçon suivante : la monogamie et la sobriété sont les clés du bonheur…
La
famille : c’est idéal !
Amy
se moque allégrement de sa sœur cadette
Kim, en couple et (belle) mère d’un petit garçon. Les deux sœurs
sont en grande opposition quant à l’avenir de leur père dépendant
et âgé - aussi une caricature de vieux con raciste méchant qui
a abandonné sa famille - Amy est profondément attachée à lui et
refuse de voir réellement qui il est. Si Kim manque clairement
d’empathie vis à vis de lui, Amy l’adore aveuglement; c’est
dommage de ne pas avoir tenté d’établir de relation familiale
moins tranchée. Kim
est rejeté par son père et sa sœur car elle a un fils un peu
« étrange » car intello / nerd… En retour, Kim
a pitié du mode de vie d’Amy et lui
dit aussi qu’elle devrait se donner les moyens d’être heureuse
c’est-à-dire de fonder une famille. Et Amy va craquer à un moment
en avouant envier sa sœur… Tout fini bien alors, l’héroïne
n’est pas une salope mais une femme qui a peur d’être heureuse !
En
réalité, Amy n’est pas flippée de la monogamie mais plutôt de
l’engagement amoureux et ce n’est pas du tout la même
chose ! Ouf !
Elle
pourrait être sauver par un gentil mâle.
Quoi
de mieux d’ailleurs, pour
Amy
que
de tomber
amoureuse d’Aaron
Conners un
médecin altruiste, riche, normal ? En
plus, il
sait
mieux qu’Amy comment elle doit se comporter, ce qui est bon ou
mauvais pour elle. Vraiment, elle a de la chance. En plus, il lui
donne l’envie d’essayer d’être une bonne personne ! Ça
fait rêver…
Crazy
Amy, un film différent ?
Clairement
pour moi, c’est non. Il ne fait que reproduire les mêmes aspects
hétéronormé que les autres et les personnages sont caricaturaux et
totalement conventionnels. Même si Amy Schumer – actrice et
scénariste – ne répond pas totalement aux normes de
beauté
hollywoodienne, elle
utilise toujours les mêmes codes « d’humour
oppressif » que
les autres pour
faire rire.
Amy
Schumer se dit féministe ou en tout cas on la considère comme
telle, pourtant
je ne vois rien de novateur dans ce film autour soit-disant du désir féminin et
de la liberté sexuelle.
Vous
aimez Amy Schumer ? Vous avez un avis totalement différent sur
cette humoriste ? N’hésitez pas à nous contacter pour nous
en parler.
Squirrel
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